Dans ma dernière communication, en novembre dernier, je vous informais que notre avocate, Me Estelle Savoie-Dufresne, avait initié diverses démarches auprès de l’Autorité des marchés financiers (AMF), du Groupement des assureurs automobile (GAA) et de certaines sociétés d’assurance automobile dans le but de dénoncer et de mettre fin à la pratique illégale des assureurs de diriger les automobilistes vers des bannières ou des ateliers de réparation « privilégiés » avec lesquels ils ont des ententes contractuelles, ententes qui comprennent un système caché de ristournes.
On ne le dira jamais assez, en plus d’être illégal selon la Loi sur l’assurance automobile et d’aller à l’encontre d’une directive très claire de l’AMF voulant que le consommateur ait le libre choix de son atelier de réparation, ce système a non seulement pour effet de flouer la clientèle automobiliste, mais peut également, dans certaines circonstances, compromettre la sécurité routière. Tout ça, c’est évidemment sans parler des impacts financiers désastreux que cette pratique clandestine a sur les carrossiers indépendants, dont les membres du Mouvement carrossier du Québec.
Faire appel au tribunal
Bien que les nombreux échanges que nous avons eus avec les diverses parties prenantes au cours des récents mois soient bel et bien engagés, nous considérons que le dossier doit être accéléré afin d’en arriver rapidement à des résultats concrets tant pour le public que pour vous. C’est pourquoi nous avons décidé de prendre la voie des recours légaux.
Notre avocate a amorcé les démarches en vue d’intenter un recours collectif (plus exactement maintenant appelée « action collective ») contre 23 sociétés d’assurance automobile et le GAA. Ils sont visés conjointement et solidairement par notre procédure.
Une première étape a été franchie le 25 mars par le dépôt, en Cour supérieure du Québec, district judiciaire de Joliette, d’une Requête pour autorisation d’exercer une action collective.
Selon la loi, cette première étape est obligatoire. Elle a pour but, grosso modo, de permettre au tribunal de constater que notre démarche est justifiée pour les raisons suivantes :
- premièrement que les questions de droit soulevées par les membres du collectif sont identiques, similaires ou connexes;
- deuxièmement, que les faits allégués paraissent justifier la conclusion recherchée, c’est-à-dire le recouvrement d’une somme pour les dommages subis et,
- troisièmement, que des poursuites individuelles plutôt qu’une action collective serait une avenue difficile ou peu pratique.
Je suis convaincu que le document préparé par notre avocate répond solidement à tous ces critères et saura convaincre le tribunal. Le document expose les motifs de notre recours en ces termes :
Les assureurs offrent et incitent à leurs assurés à choisir parmi une liste préétablie de carrossiers et garagistes de leur « Réseau d’ateliers privilégiés » pour l’exécution de réparations après sinistre en matière d’assurance automobile. L’assuré qui fait affaire avec le Réseau n’est pas informé qu’il existe des ententes de ristournes monétaires entre l’atelier et l’assureur. Les assurés paient un montant trop élevé pour la couverture d’assurance et subissent un traitement inéquitable.
Dans cette première démarche et pour les étapes qui suivront, Me Savoie-Dufresne s’est associée au bureau d’avocats Daigle & Matte, de Trois-Rivières. Ce bureau est celui-là même qui a initié l’an dernier une action collective à l’encontre des compagnies d’assurance habitation qui ont mis en place, avec leur « Réseau d’entrepreneurs de confiance », un système de références préférentiel similaire à celui contre lequel nous livrons bataille.
Même si le bureau de Daigle et Matte est impliqué dans les deux dossiers, même si une majorité de compagnies d’assurance sont nommées dans les deux actions collectives, l’un et l’autre dossier vont évoluer indépendamment et à leur propre rythme. L’avantage, c’est que l’expertise acquise dans le cheminement de l’un sera précieuse dans le cheminement de l’autre.
Les prochaines étapes
Maintenant que notre dossier est inscrit en Cour supérieure, nous nous engageons dans un processus qui est nécessairement long et lent. Il faudra savoir être patients.
Avant que la Cour nous autorise à procéder avec l’action collective elle-même, il faut compter en moyenne d’un an à un an et demi. Puis, pour l’audition du recours lui-même, alors que le juge se penchera et tranchera sur le fond, on doit compter avec un processus qui dure en moyenne trois ans.
Entre temps, dans les prochaines semaines, nous allons déposer une demande d’aide financière auprès du Fonds d’aide aux actions collectives. Ce fonds a été créé par le gouvernement du Québec pour défrayer les dépenses associées à l’action collective, entre autres, les honoraires des avocats, les frais d’expertise et les frais de cour.
De plus, dans les jours qui viennent, je vais écrire au ministre des Finances du Québec pour l’informer de notre démarche. Je lui exposerai la situation et lui expliquerai les raisons pour lesquelles nous en sommes rendus là. Je mettrai le ministre des Transports en copie de cette lettre pour qu’il soit également au fait de notre dossier.
Dès que ma lettre aura été transmise au ministre, je la déposerai sur le site du MCQ pour que vous puissiez en prendre connaissance. Du même coup, cela vous permettra d’en savoir un peu plus sur le contenu de notre action collective.
Je compte également informer très rapidement le Comité paritaire de l’automobile de notre décision de lancer une action collective à l’encontre des sociétés d’assurance automobile et du GAA dans le dossier du « dirigisme » et des ristournes cachées. Comme ma communication au ministre des Finances, je déposerai sur le site la lettre au CPA pour que vous en preniez connaissance.
Le dossier des ristournes cachées et ses effets sur les carrossiers indépendants
En terminant, je dois apporter ici une précision importante : l’action collective que nous venons de lancer ne traite que de la question des commissions secrètes et des autres infractions réglementaires qui portent préjudice au public, c’est-à-dire aux détenteurs québécois de polices d’assurance automobile. Elle ne traite pas des torts que ces mêmes pratiques nous causent comme carrossiers indépendants.
Ce dossier demeure encore entièrement ouvert.
Nous évaluons présentement quels sont les avenues juridiques les plus appropriées qui permettront de trouver une solution satisfaisante à ce problème majeur pour vous et, éventuellement, d’obtenir compensation financière pour les pertes et préjudices que nous avons encourus en raison de cette pratique illicite des assureurs automobile et des bannières commerciales d’ateliers de carrosserie. Une décision devrait être prise à cet égard d’ici juin prochain. Je vous tiendrai informés des développements dans ce dossier.
Je vous transmets mes salutations les meilleures.
Jacques Généreux, président
Mouvement Carrossier du Québec
Pour ceux qui voudraient en savoir un peu plus sur le fonctionnement d’un recours collectif, je vous invite à suivre les liens suivants :
https://www.recourscollectif.info/fr/questce-recours/
https://educaloi.qc.ca/capsules/quest-ce-quune-action-collective/